F. B. : Tu as toujours eu une mémoire d’éléphant, tu n’as jamais rien oublié et ça ne doit pas être facile...
R. G. : On écrit des livres.

Romain Gary, La nuit sera calme

Arriverai-je à me souvenir de chacune des chambres où j’ai séjourné ? Curieusement, il me semble que oui. Et j’ai un souvenir aussi précis de certaine chambre où je n’ai passé que quelques heures que de certaine autre où j’ai vécu mille et une nuits. Et par quelle chambre commencer ? Une chambre de l’enfance ? Une chambre de joie ou une chambre de tristesse ? Une chambre d’amour ou une chambre de solitude ? Et cela importe-t-il ? Peut-on ordonner (à) la mémoire comme s’il s’agissait d’un jeu de cartes dont on devrait sérier les enseignes et les figures ?

chambre_02

Je passe parfois devant cet immeuble, rue Saint-Hubert. Je m’y attarde, le temps de revoir le vitrail qu’on ne remarque vraiment que de l’intérieur et au grand jour. On ne le voyait pas du lit, posé dans l’autre partie de cette pièce double. Mais pendant la semaine que dura mon séjour, nous en sortîmes quelquefois, du lit, pour nous écrire.